ericksen, ou bien plutôt jensen. lykke, mais dans odense elle se fait appeler pia. vingt deux ans la petite sirène, andersen. au chômage, travail au black pour plusieurs petits boulots. aucunes. célibataire. agile, douce, débrouillarde, rêveuse, irréfléchie, immuable, dangereuse.

Ça vous dérange pas si je fume en même temps ? Mh, Lykke est ma voisine depuis un petit moment seulement, je me souviens plus très bien. Elle est très secrète, même son arrivée s'est faite dans la plus grande discrétion, pas de meubles, pas de cartons, rien. Juste un grand sac à baluchon la première fois que je l'ai vue. Souvent le matin elle part très tôt, sinon elle revient très tôt. Bien qu'on ait déjà parlé sur le pans du porche, de nos portes, plusieurs fois, ça n'va pas plus loin, je ne lui demande pas pourquoi elle rentre à cinq heures du matin ou pourquoi elle a un bleu sur le visage. Des fois j'ai l'impression qu'elle m'en remercie. Elle vient d'arriver comme je disais, puis on est que deux à vivre au même étage mais ici les gens ne sont pas du genre à beaucoup trainer devant le bâtiment, c'qui est dommage, mais le courant passe plutôt bien, je crois ? Souvent le matin je sors pour fumer, avec un café, je m'assois sur les marche du perron et elle est déjà là, les pieds ballants dans le canal, le regard vide. Elle a toujours un air triste sur le visage, ça fait peine à voir. Ah, quoi que, il y a bien une ou deux fois où elle s'est ramené avec un sourire niais sur le visage. Elle m'a même proposé de passer la soirée avec elle ce soir là. On était resté sur le perron à regard la nuit se poser sur le canal. Elle ne parle pas beaucoup et la plupart de mes potes, ou des locataires qui la croisent pensent qu'elle est asociale et solitaire. Pour ma part je pense juste qu'elle a beaucoup de choses à raconter, et qu'elle ne sait pas par où commencer.

Lykke s'appuie sur la carrosserie de la voiture derrière elle. Elle observe la grande rue passante qui borde le garage avec un air absent. Une voix l'interpelle et un chiffon lui cogne l'arrière de la tête. Jesper s'exclame : Lykke la cendre sur le capot! À l'entente de son vrai prénom, la rouquine se détourne un regard furieux. Elle s'approche à grand pas de son ami qui lève les bras en s'excusant. Elle marmonne deux trois insultes à son égard pour avoir été aussi irréfléchi et écrase sa cigarette sur le sol. Ton capot est plein de merdes de pigeon, et tu m'emmerdes pour de la cendre ? dit-elle tout bas. Le brun sourit, imperturbable. Il crochète le coup de Lykke d'un bras autour de son épaule. Bon Pia, on bouge, je nous ramène à la maison. Elle acquiesce, un sourire au lèvre à son tour. Il tape le capot en admirant son bolide et ferme le coffre d'un coup de main. La jeune femme s'engouffre dans la voiture et s'installe confortablement sur le siège passager. De l'autre côté de la route ou les voitures passent à plus de soixante dix kilomètres heures, un homme en habits sombre l'observe, des lunettes de soleil au verres presque noirs sur le nez. Lykke s'enfonce dans son siège, mettant à son tour ses lunette sur son nez. Elle ne passe pas inaperçu avec cette chevelure. Jesper magne toi. Elle hausse la voix une nouvelle fois pour l'appeler et il s'assied à son tour, démarrant sur le champ pour les ramener vers le canal, toujours dans Odense West. Jesper ne pose pas de questions, il fait des blagues à ce sujet même, ce qui fait franchement rire son amie. Elle se détend, l'esprit tout de même en alerte. Elle n'y fait pas très attention mais le trajet semble un peu plus long, comme si il faisait exprès de prendre des petites rues. La voiture s'arrête près du canal, un paysage à la fois très industriel mais simple et beau aux yeux de Lykke. Elle le regarde un moment avant d'attraper son paquet de cigarettes sur le tableau de bord et de sortir du véhicule. Son voisin lui tient la porte, alors elle entre, se dirigeant automatiquement vers les boites aux lettres. On est dimanche Lykke. murmure le brun. Elle lui sourit et fait tourner ses clés dans sa main. Elle ne reçoit jamais de courrier de toute manières. Des factures irrégulières pour l'appartement ou l'électricité, rien d'extravagant. Or elle ouvre quand même grand le compartiment, pour le trouver bien vide, sous les rires de Thomsen. Sans même ciller elle le referme et se dirige vers le n°4 couleur or posé sur la porte. L'écriteau a prit un coup de vieux, la couleur sombre du support sous la peinture dorée ressort à plusieurs endroit, si bien qu'on voit tout juste le numéro de l'appartement. Lykke s'en moque, à part Jesper et Inge, personne n'a besoin de savoir ou elle vit pour le moment. Elle se tourne vers son voisin qui la toise. Je vais prendre une douche. dit-elle. Le sourire du jeune homme s'agrandit, mais avant qu'il ait pu en placer une, elle rajoute. Je viens après. D'un coup d'épaule, elle fait s'ébranler la porte de son support qui grince fortement. Comme toujours, elle se promet de huiler les boulons plus vieux que le monde dès qu'elle aura un peu de temps.

La porte fermée, Lykke s'appuie dessus en soufflant. L'homme là bas l'avait repéré, ça elle en était sûre. Mais ils ne savaient pas où elle habitait, et avec un peu de chance, elle serait toujours comptée comme morte au sein de sa famille. Elle déglutit avec difficulté et tourna trois fois le robinet d'eau chaud, puis une fois celui d'eau froide pour que l'eau commence à couler dans la baignoire. Les pensées sont douloureuses et les souvenirs amers, la jeune Ericksen n'a pas envie de penser à son père, encore moins à son frère, si c'est pour finir par étouffer grossièrement ses sanglots dans son oreiller. Elle arrête les robinets d'une main et débouche le contenant de l'autre, pensant réellement d'un bain n'est pas une bonne idée présentement, et qu'elle ferait mieux de prendre une douche froide pour s'éclaircir les idées. Passer la nuit chez Jesper serait mieux aussi, tout ça pour ne pas réfléchir un peu trop et finir par déambuler dans Odense pour attirer l'attention. Demain elle s'était promit d'aller dans le centre. Elle passerait par le centre de police, le café à côté ou elle a prit l'habitude d'aller. Le détective et elle avait eu une discussion, et Lykke sentait bien que ça n'était que le début. Elle se déshabille en vitesse, un sourire niais au visage et s'empresse de se doucher à l'eau presque froide pour se réveiller. Son voisin lui avait préparer tout un programme de vieux films et autres classiques que la rouquine n'avait jamais vu. À l'époque elle ne regardait jamais la télévision, toujours en train de s'entrainer, de lire des vieilles archives où, lorsqu'elle grandit, sur le terrain en compagnie de Kjeld ou des hommes de mains de son père. Jesper lui ouvre la porte en secouant un petit sac en papier brun au dessus de sa tête ; la jeune femme en devine le contenu avec un sourire.